Dans les ruelles de Mombasa

Les matelas tressautent avec souplesse. Une drôle de parade aux couleurs fluo et motifs fleuris, menée à cadence soutenue par les ouvriers du vieux port de Mombasa, au détour d'une ruelle du quartier ancien. Car, s'il n'a pu s'étendre, le port historique de la ville kényanne n'est pas encore prêt à se ranger dans un cadre de carte postale et servir de marina pittoresque aux plaisanciers de passage. C'est une petite structure en constante ébullition.

Bien que naturellement très profond, il n'accueille que les boutres, quelques petits cargos et des voiliers. La proximité de la ville, à deux pas des hangars, et le manque d'espace à terre conduisent les Britanniques à se tourner, dès 1896, vers un site plus au sud, certes moins profond mais permettant l'installation d'infrastructures portuaires d'envergure. Un déplacement des activités qui n'a pourtant pas réussi à asséner le coup de grâce au port où ont transité pendant des siècles Arabes, Portugais et Asiatiques. Et les enfants rieurs qui se hissent aux aussières pour mieux sauter dans l'eau ne paraissent pas troubler la concentration des ouvriers qui chargent les marchandises à un rythme dérisoire, tongs usées pour les mieux chaussés, les autres allant pieds nus. Bidons en plastique, sac de thé, matelas de mousse, les piles de marchandises fluctuent à l'ombre des hangars à l'entrée du port. Les sacs s'empilent en partance pour la Somalie. A l'image de la ville, les équipages offrent un paysage métissé. Quelques Indiens s'amusent de puis leur pont à voir des adolescents sur une planche de surf, chavirer sans doute à dessein.

L'essentiel des embarcations est , ici, destiné au cabotage. D'ailleurs, à voir la coque rouillée du seul cargo à quai et le peu d'espace réservé aux équipages des boutres sur le pont, on imagine mal ces navires embarqués pour de longues traversées. Pourtant, il y a à peine quelques décennies, au début du XXème siècle, hommes et marchandises traversaient parfois tout l'océan Indien avant de toucher les côtes kényannes à bord de ce type de bateau.

Julie Desné

 

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